"Mon père a filmé la libération de Perpignan"

Jean-Claude Baudot est âgé d'une dizaine d'années ce 19 août 1944 lorsque son père, cinéaste-amateur filme les premiers jours de la libération de Perpignan.

"Mon père a entendu un grand boom. Il va alors à la fenêtre et voit une énorme fumée au dessus du palais des Rois de Majorque. Il prend sa caméra Kodak 16 mm et filme l'incendie depuis la terrasse de notre maison. L'arsenal de l'armée allemande situé dans le couvent des Carmes venait d'exploser!" me confie fièrement Jean-Claude Baudot du balcon de l'ancienne maison familiale rue des Archers à Perpignan. Car le film réalisé par Auguste Pierre Baudot, le papa, est unique. Aucune image animée de la libération n'était connue dans le landernau des passionnés d'Histoire des Pyrénées-orientales jusqu'à ma rencontre avec Jean-Claude.

C'était en décembre 2018. Je réalisais un reportage sur une exposition de copy-art que Jean-Claude avait accrochée au domaine de Rombeau à Rivesaltes. Je travaillais alors pour la rédaction de France 3 à Perpignan. Prolixe dans ses conversations, le Parisien m'explique que ses parents fuyant leur Lorraine, s'étaient installés à Perpignan en 1942. Son père était médecin radiologue mais aussi cinéaste-amateur. Ce qui pour l'époque était très rare car l'équipement, les films et le développement coûtaient très chers.

Et c'est là qu'il me déclara tout de go. "on a beaucoup de films de famille mais aussi mon père a filmé la libération de Perpignan".

Une dernière phrase qui fit "tilt" dans ma tête. Je savais qu'un tel document n'existait pas. Aussitôt je lui proposais de numériser son film et de le déposer à l'Institut Jean Vigo pour le conserver dans de bonnes conditions. Et ainsi de le mettre à disposition du public car ces archives filmées inédites, visibles depuis 2019 sur internet, sont un bien commun du patrimoine historique des Pyrénées-Orientales. On y voit Perpignan avec les véhicules allemands calcinés, le défilé de la Libération, mais aussi les destructions de Canet par les bombardements des Alliés et la destruction des quais de Port-Vendres par la Wehrmacht.

Dans le reportage qui suit, Jean-Claude Baudot est interviewé sur le balcon de la maison où, enfant, il vivait. Les nouveaux propriétaires nous ont aimablement ouvert leur porte.

À l'âge de 91 ans, il raconte le déroulé de ce document exceptionnel avec toujours beaucoup de fierté et d'admiration pour ses parents exceptionnels...